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contre lui, condamné ; qu’ensuite tous les donatistes demeurant encore dans l’opiniâtreté de ce schisme détestable, l’empereur soumit de nouveau la question à l’examen et à la décision d’un concile à Arles ; qu’ils en appelèrent de ces jugements ecclésiastiques à Constantin lui-même ; que devant ce nouveau tribunal, les deux parties étant présentes, l’innocence de Cécilien fut reconnue une fois de plus, que les donatistes se retirèrent confondus et n’en persistèrent pas moins dans la même perversité d’opinion ; que l’affaire de Félix, évêque d’Aptonge, ne fut pas négligée, mais que, par l’ordre du même prince, elle fut envoyée au tribunal du proconsul, qui proclama l’innocence de l’évêque Félix.

5. Mais comme nous ne faisions que rappeler ces faits sans avoir la preuve sous les yeux, nous paraissions ne pas accomplir tout ce que vous attendiez de nous, et, sans retard, nous envoyâmes chercher ce que nous avions promis de lire ; en moins de deux jours ; nous courûmes les chercher à l’église de Gélitsi et les apportâmes tous à votre ville ; puis, comme vous savez, on vous lut, dans l’espace d’une journée, tout ce qu’il fut possible : ce furent d’abord les actes par lesquels Sécondus, évêque de Tigisis, n’osa pas déposer des traditeurs s’avouant tels, et osa, sur leur déposition, condamner Cécilien et ses autres collègues quoiqu’ils fussent absents et n’avouassent rien ; ce furent ensuite les actes proconsulaires, qui attestent l’innocence de Félix après un examen très-attentif. Vous vous souvenez que ces pièces vous furent lues avant midi. Nous vous lûmes dans l’après-midi les requêtes des donatistes à Constantin, le récit de leur affaire portée à Rome devant les juges nommés par l’empereur, qui les condamnèrent et maintinrent Cécilien sur son siège ; enfin les lettres de Constantin où tous ces faits éclatent avec des preuves d’incomparable autorité.

6. Hommes, que voulez-vous de plus ? que vous faut-il encore ? Il ne s’agit ni de votre or ni de votre argent ; nous n’avons pas à discuter pour une terre, des héritages ou la santé de votre corps : nous excitons vos âmes pour les faire arriver à l’éternelle vie et les arracher à l’éternelle mort. Réveillez-vous donc. Nous ne remuons point ici une question obscure ; nous ne cherchons pas à pénétrer des secrets inaccessibles aux investigations des hommes ou dont un petit nombre seulement puisse percer la profondeur ; il s’agit d’une chose évidente Qu’y a-t-il de plus clair et de plus facile à voir ? Nous disons qu’un concile téméraire, quoique très-nombreux, a condamné des innocents et des absents ; nous le prouvons par les actes proconsulaires qui déclarent innocent celui-là même dont les actes de votre concile font sonner le plus haut la culpabilité. Nous disons que ce sont des traditeurs, se reconnaissant comme tels, qui ont porté la sentence contre des hommes accusés de l’être ; nous le prouvons par les actes ecclésiastiques, où on lit leurs noms, et où Sécondus, évêque de Tigisis, pardonne, sous le voile d’un sentiment pacifique, un crime constaté, et rompt ensuite la paix en condamnant sans connaître : ce qui montre bien qu’il ne se préoccupait pas des intérêts de la paix, mais qu’il craignait pour lui-même. Car Purpurins, évêque de Limat, lui rappela que lui Sécondus, emprisonné afin d’être forcé de livrer les Écritures, n’avait pas recouvré pour rien sa liberté, et qu’il avait livré ou fait livrer les livres saints ; ce fut alors que l’évêque de Tigisis, redoutant les effets d’un soupçon assez fondé, après avoir pris conseil d’un parent du même nom que lui, et avoir consulté aussi ses collègues présents, crut devoir abandonner au jugement de Dieu les crimes les plus évidents, et se donna les airs de sauver la paix : c’était faux, puisqu’il ne sauvait que lui-même.

7. Si la pensée de la paix avait habité dans son âme, il n’aurait pas condamné, à Carthage, avec ces traditeurs coupables de leur propre aveu et laissés au jugement de Dieu, les absents que personne n’avait convaincus de ce même crime auprès de lui. Car il devait d’autant plus craindre de rompre l’unité de la paix, qu’il se trouvait là dans une grande et illustre cité d’où le mal, une fois commencé, se répandrait comme de la tête sur tout le corps de l’Afrique. De plus, Carthage est voisine des régions d’outre-mer, et le monde entier connaît son nom ; aussi l’autorité de son évêque n’est pas petite, et il pouvait ne pas prendre souci de la multitude de ceux qui conspiraient contre lui, en se voyant uni de communion avec l’Église de Rome où la chaire apostolique a toujours gardé sa forte primauté[1], et avec les autres contrées

  1. … Romance ecclesiae, IN QUA SEMPER APOSTOLICAE CADHEDRAE VIGUIT PRINCIPATUS. Nous recommandons à l’attention et à la bonne foi des protestants ces paroles écrites, il y a près de quinze siècles.