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histoire de saint augustin.

voulurent point laisser impunie l’audace des assaillants, et les prudentes remontrances de leurs chefs ne purent les empocher de commettre des excès ; mais nulle violence, nul meurtre ne s’accomplit avec la participation, le conseil ou l’aveu des évêques catholiques[1]. Telle fut l’origine du nom de macarienne que les donatistes avaient donné à l’Église, et tels furent les temps macariens tant de fois reprochés aux catholiques.

Fortunius, dans ses moyens de défense, ne négligea donc pas le souvenir des excès commis à l’époque du passage de Macaire. Augustin lui répondit que la complicité des Églises d’outre-mer dans ces désordres était une supposition gratuite, et que quand même la complicité s’établirait, il faudrait que les donatistes pussent prouver qu’avant ce temps ils étaient en communion avec les Églises de toute la terre. Là-dessus Fortunius produisit un certain livre renfermant la preuve que le concile de Sardique, tenu en 347, avait écrit à des évêques africains du parti de Donat. Mais Augustin découvrit que ce concile était arien et qu’il condamnait le grand Athanase.

L’évêque donatiste de Tubursy était un vieillard d’un esprit modéré ; il parla avec un certain regret de la réitération du baptême, passée en coutume chez les donatistes, et déplora les énormités de son parti. On demeura d’accord que, dans ces sortes de conférences, il ne fallait pas s’objecter mutuellement les violences des méchants, et que la grande et unique affaire était l’examen du point d’où le schisme prenait naissance. On se sépara avec l’idée de réunir dix évêques catholiques et dix évêques donatistes pour achever cet important débat. Augustin voudrait dérober la nouvelle conférence au tumulte de la foule, et propose comme lieu de réunion quelque paisible bourgade dans le territoire de Tubursy ou de Thagaste.

Cette conférence si désirée n’eut pas lieu. Les donatistes n’aimaient pas les explications ni l’exposé des faits ; ils les fuyaient surtout depuis que la Providence avait mis entre les mains d’Augustin la défense de la foi catholique.

Il est question, à la fin de cette lettre, de la secte des célicoles ou adorateurs du ciel, qui avaient établi un nouveau baptême, quoiqu’ils n’appartinssent à aucune des communions chrétiennes. Le code de Théodose les range à côté des juifs et des samaritains ; leurs idées religieuses se confondaient assez avec celles des hypsistaires[2], les adorateurs du Très-haut.

Augustin eut un entretien avec le chef des célicoles à Tubursy ; il ne nous dit pas quel en fut le résultat. Ambassadeur de la vérité, le coadjuteur de Valère plaidait sa cause contre tous ceux qui avaient le malheur de ne pas la connaître.




CHAPITRE QUINZIÈME.




Zèle de saint Augustin pour la prédication. — Conduite des évêques vis-à-vis du polythéisme. — Les quatre livres de l’Accord des Évangélistes. — Le livre des Choses qu’on ne voit pas. — Le livre sur la Manière de catéchiser les ignorants. — Sur le Travail des Moines.

Lorsque ses devoirs ou les besoins de l’Église d’Afrique le conduisaient dans quelque ville, Augustin, sollicité par les pasteurs et les fidèles du lieu, ne refusait jamais de se faire entendre. Le zèle de la maison du Seigneur dévorait son âme ; il voyait l’Église attaquée par les hérétiques, les païens et les juifs ; il aurait voulu que sa parole eût pu être écoutée partout à la fois. Les basiliques de Carthage retentissaient de la voix d’Augustin, à chaque voyage qu’il faisait dans la métropole africaine. Parmi les motifs qui l’animaient ici, nous devons placer le désir d’instruire la ville qui avait été le principal témoin des erreurs de sa

  1. Optat, liv. III
  2. Les hypsistaires étaient ainsi appelés du mot grec ὕψιστος (le Très-Haut)