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Toute créature tient l’être de la pure bonté de Dieu. — Il découvre dans les premières paroles de la Genèse et la Trinité de Dieu et la propriété de la personne du Saint-Esprit. — Image de la Trinité dans l’Homme. — Dieu procède dans l’institution de l’Eglise comme dans la création du monde. — Sens mystique de la création.

Chapitre premier, Invocation. — gratuite munificence de Dieu.

1. Je vous invoque, ô mon Créateur, mon Dieu et ma miséricorde, qui avez gardé mon souvenir quand j’avais perdu le vôtre. Je vous appelle dans mon âme, et vous la préparez à vous recevoir en lui inspirant ce vif désir de votre possession. Oh ! répondez aujourd’hui à cet appel que vous avez devancé, quand vos cris réitérés, venant de si loin à mon oreille, me pressaient de me retourner et d’appeler à moi Celui qui m’appelait à lui. Seigneur, vous avez effacé tous mes péchés, afin de n’avoir point à solder les œuvres de mon infidélité, et vous avez prévenu mes œuvres méritantes, afin de me rendre selon le bien opéré en moi par vos mains, dont je suis l’ouvrage. Car vous étiez avant que je fusse, et je n’étais rien à qui vous pussiez donner d’être. Et me voilà toutefois, je suis par votre bonté qui a devancé tout ce que vous m’avez donné d’être, tout ce dont vous m’avez fait. Vous n’aviez pas besoin de moi, et je ne suis pas tel que ce peu de bien que je suis vous seconde, mon Seigneur et mon Dieu ; que mes services vous soulagent, comme si vous vous lassiez en agissant ; que votre puissance souffrit de l’absence de mon hommage ; que vous réclamiez mon culte, comme la terre réclame ma culture, sous peine de stérilité ; mais vous voulez mes soins, vous voulez mon culte, afin que je trouve en vous le bien de mon être ; car vous m’avez donné l’être qui me rend capable de ce bien.

Chapitre II, Toute créature tient l’être de la pure bonté de Dieu.

2. C’est de la plénitude de votre bonté que vos créatures ont reçu l’être ; vous avez voulu qu’un bien fût qui ne pût procéder que de vous, inutile, inégal à vous-même. Etiez-vous donc redevable au ciel, à la terre, que vous avez créés dans le principe ? Je le demande à ces créatures spirituelles et corporelles que vous avez formées dans votre sagesse, leur étiez-vous redevable de cet être, même imparfait, même informe, dans l’ordre spirituel ou corporel, être tendant au désordre et à l’éloignement de votre ressemblance ? L’être spirituel, fût-il informe, est supérieur au corps formé ; et cet être corporel, fût-il informe, est supérieur au néant ; et tous deux demeureraient comme une esquisse informe de votre Verbe, si ce même Verbe ne les eût rappelés à votre unité, en leur donnant la forme, et cette excellence qu’ils tiennent de votre souveraine bonté. Leur étiez-vous redevable de cette informité même, où ils ne pouvaient être que par vous ?

3. Etiez-vous redevable à la matière corporelle de l’être, même invisible et sans ordre ? car elle n’eût pas même été cela, si vous ne l’eussiez faite ; et n’étant pas, comment pouvait-elle mériter de vous son être ? Et cette ébauche de créature spirituelle, lui étiez-vous redevable de cet être même ténébreux et flottant, semblable à l’abîme, dissemblable à vous, où elle serait encore, si votre Verbe ne l’eût ramenée à son principe, et, en l’illuminant, ne l’eût faite lumière, non pas égale, mais conforme à votre égalité formelle ? Pour un (501) corps,