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histoire de saint augustin.

CHAPITRE CINQUANTE-CINQUIÈME.




Hommage rendu à saint Augustin par Théodose le Jeune. — Boniface ; sa fin. — Levée du siège d’Hippone ; évacuation et ruine de cette ville. — Comment Salvien expliquait l’invasion des Vandales. — Bélisaire et la fin de la domination des Vandales en Afrique. — Un mot sur la chute rapide de l’Église d’Afrique. — Les reliques de saint Augustin. — Dernière appréciation saint Augustin.

Une éclatante marque d’admiration fut donnée à saint Augustin lorsque déjà il planait dans l’infini, bien au-dessus des témoignages de la terre. Un concile œcuménique contre l’hérésie des nestoriens devait se tenir à Éphèse ; des lettres de Théodose le Jeune convoquaient tous les métropolitains ; quoique la ville d’Hippone n’eût point rang de métropole, l’évêque de cette Église, alors qu’il s’appelait Augustin, surpassait tous les autres évêques dans l’opinion contemporaine. L’empereur d’Orient chargea donc un officier de sa cour de porter un rescrit particulier[1] au grand docteur dont la gloire remplissait le monde ; mais l’officier de Théodose, arrivé à Hippone vers la fin de décembre 430 ou au commencement de janvier 431, trouva saint Augustin dans le sépulcre !

Cependant le siège d’Hippone continuait toujours ; il se prolongea onze mois après la mort de saint Augustin. La ville, soutenue par le comte Boniface, persévérait dans la résistance. D’ailleurs les Vandales avaient peu de moyens de s’emparer d’une place ; il suffisait d’une résistance opiniâtre pour lasser leur courage. Les Vandales levèrent donc le siège. Peu de temps après, un secours était arrivé de Rome et de Constantinople ; Boniface tenta un dernier coup contre l’ennemi ; dans la seconde bataille, comme dans la première avant le siège d’Hippone, la fortune trahit son génie. En 432, Boniface était en Italie, et Placidie l’élevait au rang de patricien pour effacer plus complètement les souvenirs du passé. Placidie et Boni face se voyant pleinement réconciliés, s’imaginèrent qu’ils étaient victorieux ; une médaille fut frappée avec la tête de Valentinien d’un côté, et, de l’autre, Boniface[2] assis sur un char de triomphe, attelé de quatre coursiers, tenant un fouet dans la main droite et une palme dans la main gauche : c’était comme une moquerie jetée à la face du sort. Boniface avait un compte à demander à Aétius ; une lutte s’engagea entre ces deux hommes qu’on a appelés les derniers des Romains ; Boniface gagna la bataille et perdit la vie, à la suite d’une blessure reçue de la main d’Aétius, que la vengeance impériale déclara rebelle.

Le départ de Boniface vaincu avait laissé la ville d’Hippone presque sans espérance ; les ennemis ne l’assiégeaient plus, mais la menaçaient toujours. Hippone attendit inutilement des secours ; abandonnés du monde romain, les habitants se décidèrent à fuir leur ville résolution pleine de douleur ! Quoi de plus triste que le spectacle d’un peuple s’arrachant pour toujours à ses foyers, aux lieux pleins du

  1. La Circulaire de Théodose le Jeune est datée du 19 novembre 430.
  2. Il n’y a peut-être pas de second exemple, dit Gibbon, de la représentation d’un sujet sur le revers de la médaille d’un empereur.