Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome I.djvu/300

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
288
histoire de saint augustin.

et souvent même les propres expressions du grand docteur d’Hippone. Les autres conciles des Gaules, où les matières de la grâce ont été agitées ; celui de Valence, en Dauphiné, tenu en 855, par les ordres de l’empereur Lothaire, et composé des provinces de Lyon, d’Arles et de Vienne ; celui de Langres, tenu en 859, en présence du roi Charles le Jeune, frère de Lothaire ; celui de Toul, quinze jours après, tenu en présence de l’empereur Charles le Chauve et des deux rois Lothaire et Charles le Jeune, composé de douze provinces de France et d’Allemagne, et appelé concile universel ; toutes ces grandes assemblées catholiques s’inspirèrent d’Augustin dans les questions auxquelles son nom est resté attaché avec tant de gloire.

Le cardinal du Perron ne tonnait rien d’aussi grand que saint Augustin, depuis les Apôtres, au point de la prédestination. Au jugement de Vasquet, l’évêque d’Hippone, sur ces matières, tient parmi les Pères le rang que tient le soleil parmi les autres astres. Clément VIII, Alexandre VII, Innocent XI[1], fidèles aux anciennes traditions du siège apostolique, ont proclamé l’inébranlable autorité d’Augustin dans les plus difficiles sujets que puisse remuer l’intelligence humaine.

Que dirons-nous maintenant de Grotius et de quelques autres qui ont voulu voir des nouveautés dans les doctrines de saint Augustin, qui ont déclaré ces doctrines contraires à l’ancienne tradition, et se sont efforcés d’opposer les Grecs aux Latins ? Pour eux, la perfection catholique sur ces matières se trouve dans le livre des Questions sur l’Épître aux Romains, composé en 394, lorsque saint Augustin n’avait pas suffisamment creusé le sujet : nondum diligentius quaesiveram. Ils supposent que son enseignement définitif n’a été, que le produit de ses ardents combats avec les pélagiens, et oublient que le docteur s’était rectifié lui-même dès l’année 397, longtemps avant ses grandes luttes. Les livres de la Prédestination des Saints et du Don de la Persévérance sont ceux que les modernes semi-pélagiens ont le plus attaqués, et ce sont précisément les ouvrages que l’Église universelle loue et vénère le plus ! Quand on leur demande où était l’ancienne tradition à laquelle l’évêque d’Hippone aurait substitué son opinion personnelle, ils ne répondent rien de sérieux. Grotius, qui avait beaucoup appris en vieillissant et qui s’était tant rapproché de l’Église catholique, aurait dû comprendre le progrès des études religieuses de saint Augustin ; mais le génie humain donne parfois le spectacle d’inconséquences étranges. Bossuet nous dit que Grotius s’arrêta dans un chemin uni, sans avoir enfanté l’esprit de salut qu’il avait connu ; « tant il est difficile aux savants du siècle, accoutumés à tout mesurer à leur propre sens, d’en faire cette parfaite abdication qui seule fait les catholiques[2]. »




  1. Une bulle d’Innocent XI, du 23 février 1677, accordée à la prière du roi d’Espagne et aux sollicitations du cardinal Nittard, établissait la fête de saint Augustin comme de précepte dans toute l’Espagne.
  2. Dissertation sur Grotius.