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histoire de saint augustin.

informations sur le concile de Nicée. Les évêques d’Afrique écrivirent à Zozime, qui peut-être ne reçut pas leur lettre, car il mourut le 26 décembre 418.

Cinq mois après, deux cent dix-sept évêques d’Afrique se réunissaient en concile à Carthage, dans la basilique de Fauste, sous la présidence d’Aurèle. Faustin était présent ; Philippe et Asellus, simples prêtres, avaient leur place au-dessous des évêques. La discussion porta d’abord sur le canon attribué au concile de Nicée, et que le pape Zozime avait mis en avant dans les instructions remises aux trois légats. Alype, prenant la parole, rappela que les exemplaires grecs du concile de Nicée ne renfermaient rien de pareil ; il pria le saint pape Aurèle d’envoyer à Constantinople pour consulter l’original de ce concile, et de s’adresser aux évêques d’Alexandrie et d’Antioche ; Alype était aussi d’avis de supplier le pape Boniface, successeur de Zozime, de travailler de son côté à cette importante vérification. Les propositions de l’évêque de Thagaste furent accueillies. Le concile fit ou renouvela trente-trois décrets relatifs à la discipline ecclésiastique ; ces canons de Carthage furent reçus de tout l’Occident ; traduits en grec, ils eurent place dans la collection des canons de l’Église orientale. Es nous représentent la vieille constitution de l’Église ; ces témoignages de la liberté catholique dans l’ordre ancien font songer à l’état présent de l’Église de France, qui ne peut plus ni réunir ses pasteurs, ni juger dans ses propres causes, et qui redemande en vain les droits sacrés transmis par les siècles, conquis par les travaux des apôtres et le sang des martyrs.

Ce fut le 25 mai 419 que se tint le concile qu’on appelle le sixième de Carthage. Cinq jours après, les évêques se rassemblèrent encore dans la basilique la Restituée ; les trois légats étaient présents. On y régla plusieurs affaires que nous ignorons, et comme il en restait d’autres à terminer, on décida de choisir des commissaires, afin que les évêques ne demeurassent pas trop longtemps éloignés de leurs diocèses. On nomma vingt commissaires, parmi lesquels figuraient Augustin, Alype et Possidius, représentants de la Numidie. Après que tout fut fini, une lettre au nom du concile fut adressée au pape Boniface. Les évêques laissaient voir combien il avait été difficile de résoudre les questions posées par Zozime sans blesser la charité ; ils annonçaient la conclusion de l’affaire d’Apiarius, conclusion qui n’avait eu rien de violent et pour laquelle les deux parties s’étaient rapprochées. Apiarius avait demandé pardon de ses fautes, et l’évêque de Sicca était revenu sur sa procédure. Les évêques rétablissaient le prêtre dans la communion et dans le sacerdoce, mais, en vue de la paix, ils l’éloignaient de l’Église de Sicca ; ils le munissaient d’une lettre à l’aide de laquelle Apiarius pouvait exercer partout ailleurs le saint ministère. Les évêques acceptaient les décrets de Zozime en attendant leur vérification dans les exemplaires les plus complets du concile de Nicée. Une certaine vivacité de langage se montre dans leur lettre à Boniface. « Nous espérons, disent-ils, en la miséricorde de Dieu, que, puisque vous êtes maintenant assis sur le trône de l’Église romaine, nous n’aurons plus à souffrir ce faste du siècle indigne de l’Église de Jésus-Christ, et qu’on ne nous refusera pas la justice que la seule raison devrait nous faire obtenir sans que nous la demandassions. »

L’épiscopat africain ne s’était point trompé ; les copies des actes du concile de Nicée, faites à Constantinople et à Alexandrie, n’offrirent rien de plus que les copies de Carthage. On les transmit au pape Boniface. L’Église d’Afrique garda sa coutume de juger ses prêtres définitivement et sans appel.

Sans nous arrêter au livre de la Patience, composé en 418, nous jetterons un coup d’œil sur des ouvrages plus importants qui appartiennent à l’année 419. Un écrit pélagien avait accusé l’évêque d’Hippone de condamner le mariage ; un ami d’Augustin, le comte Valère, ayant eu connaissance de cet écrit, se hâta de démentir l’assertion pélagienne. De son côté, le grand docteur ne laissa pas longtemps la calomnie sans réponse ; il dicta, un livre des Noces et de la Concupiscence qu’il dédia à Valère, en lui adressant une lettre[1] pleine d’éloges pour cet homme d’épée. Dans ce livre, Augustin établit avec force et netteté le dogme du péché originel et la sainteté du mariage, qui change en quelque chose de bon le mal de la concupiscence. La gloire du mariage, c’est de faire servir aux vues providentielles les désirs de la chair, si contraires aux désirs de l’esprit[2]. L’évêque d’Hippone fait ressortir la beauté morale de cette union que la stérilité elle-

  1. Lettre 200.
  2. S. Paul, Galat., V. 17.