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AVIS DE L’ÉDITEUR.

se sont chargés de revoir toutes les traductions, afin que la langue de saint Augustin y respire exactement et pleinement, et que cette édition fasse pour ainsi dire autorité.

Avant chaque écrit on en trouvera une analyse raisonnée comme dans mon Bossuet et mon saint Jean Chrysostome.

Quant au classement des matières, tout en nous préoccupant de l’ordre logique, nous nous sommes, autant que possible, attachés à l’ordre des temps, d’après l’édition même des Bénédictins dont la place est faite depuis si longtemps.

Le dernier volume se termine par les tables : table alphabétique des innombrables matières traitées dans les écrits de saint Augustin : table des passages de la sainte Écriture commentés par lui.

Il me reste à devancer un reproche : pourquoi, me dira-t-on, traduire en français des ouvrages que le clergé lirait en latin ? Je pourrais faire observer que l’idée de traduire les Pères n’est pas une innovation dans l’Église, et, sans sortir du cercle des trois grands Docteurs que j’édite, rappeler cette remarquable prière adressée par saint Augustin à saint Jérôme : Nous vous en supplions, et toute la société lettrée des Églises d’Afrique vous en supplie avec nous : ne craignez pas de consacrer vos soins et votre application à traduire ceux des auteurs grecs qui ont le mieux interprété nos Écritures. Vous pouvez faire ainsi que ces grands hommes deviennent notre propriété comme ils sont la vôtre. (Lett. xxviii, n. 2, ci-dessous, pag. 554.) Bossuet lui-même, dans cet écrit jusqu’alors peu connu qu’il commence ainsi : « Pour la prédication, il y a deux choses à faire principalement : former le style, — apprendre les choses, » ajoute : « À l’égard, de saint Chrysostome, son ouvrage sur saint Matthieu l’emporte, à mon jugement. Il est bien traduit en français, et on pourrait tout ensemble apprendre les choses et former le style. » (Tom. xi, pag. 440-442[1].)

Je préfère envisager l’objection en elle-même. Peut-être serait-elle fondée si elle concernait les traités de théologie scolastique ou les ouvrages uniquement destinés aux ecclésiastiques et aux savants : aussi l’ai-je évitée en publiant en latin les Dogmes théologiques du P. Pétau, les Annales ecclésiastiques de Baronius : agir autrement, ce serait déshabituer le clergé de la langue de l’Église. Mais traduire saint Augustin, ce n’est pas détourner le lecteur du texte latin : c’est l’y préparer. Les traducteurs n’ont point pour but de suppléer le texte, mais d’inviter à le lire et de rendre cette lecture plus facile, car elle ne l’est pas toujours. Si je ne l’ai pas mis en regard du français, c’est qu’il se trouve dans toutes les bibliothèques et qu’on se le procure à très-bon marché chez M. l’abbé Migne.

Quelquefois le temps manque pour lire le latin : dans la traduction française on parcourt rapidement une homélie, un traité pour le besoin du moment.

C’est le français, et non le latin, qu’un ecclésiastique tâchera de conseiller, de prêter aux gens du monde, qui trouveront, dans les plus beaux écrits de saint Augustin, de quoi éclairer leur intelligence et nourrir délicieusement leur piété.

Il y a aujourd’hui dans la société française et parmi les gens du monde du plus haut rang un goût marqué pour les lectures sérieuses et pour l’étude des monuments du Christianisme. Il est impossible de leur demander de lire saint Augustin en latin ; il leur faut donc une traduction française : car ne pas lire saint Augustin, ce serait rester étranger aux plus grands efforts de l’esprit humain en faveur de la vérité.

LOUIS GUÉRIN,
Imprimeur-Éditeur.
  1. Voici une autorité plus récente, Mgr Arnoldi, qui vient de mourir évêque de Trèves ; ce sage et ferme défenseur des droits de l’Église catholique dut les commencements de sa célébrité à une traduction allemande des homélies de saint Jean Chrysostome et du traité du sacerdoce qu’il jugea utile d’offrir au clergé de son pays.