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à un paysan qu’à un riche bourgeois des petites villes de la Souabe. Regardez ce visage brûlé par le soleil et hâlé par l’air vif des champs. N’y lisez-vous pas que celui qui le porte a coutume de parfaitement dîner ? Voilà qui venge la pomme de terre incomprise de tous les sarcasmes asiatiques des Hongrois. Le Bohémien affamé et déguenillé, le Valaque, ce maigre mangeur d’oignons, le Magyar, qui n’aime rien tant que sa pipe, n’atteindront jamais une telle prospérité.

La maison du Saxon est abondamment fournie de tout ce que la commodité exige. Les chambres en sont grandes, aérées, suffisamment éclairées. Des meubles pareils à ceux de nos paysans sont rangés le long des murs. Buffet et vaisselle, tout cela est fort brillant. Dans un coin est placée la Bible de famille. Chaque chose est à sa place. La femme va et vient, jette le regard du maître, prépare le repas. Elle a, avec son épais jupon de laine, une veste noire semblable à un dolman, et sur la tête un voile blanc, coiffure que les jeunes filles remplacent par un petit shako de velours noir. Chaussée de ses interminables bottes, elle enfourche hardiment son cheval et mène bravement l’attelage, tandis que son mari tient la charrue. Nulle part la femme n’apporte un plus utile concours. Le soir venu, de nouvelles occupations surgissent, et souvent le vigoureux Saxon, prenant la quenouille, file, comme filait Hercule, auprès de sa massive compagne.