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traient dans le camp, mutilés pour avoir suivi les drapeaux de Kemény. On comptait ceux qui avaient été mis à mort. Un Sicule, Ambroise Gelentzei Szöke, récitait des vers enthousiastes qu’il avait écrits le matin même sur les marges de sa Bible. On se disait que la victoire était assurée, et on attendait avec impatience le moment d’en venir aux mains.

Mais la fortune trahit les Hongrois, Kemény fut renversé dans une charge qu’il conduisit lui-même, et sa propre cavalerie le foula aux pieds. La mort du général ébranla l’ardeur des siens. Ils furent bientôt mis en déroute. Toutefois les Turcs achetèrent leur victoire. Le compagnon le plus cher de Koutchouk-Pacha fut tué dans la bataille. Koutchouk en ressentit une vive douleur ; il jura de trouver le corps de Kemény, de le dépouiller, et de faire promener par toute la Transylvanie la peau du prince emplie de paille. II aurait tenu sa parole si François Bethlen, proche parent de Kemény, ne l’eût enseveli secrètement.

Michel I Apaffi, resté sans compétiteur, fut reconnu prince par toute la noblesse transylvaine. Il est à remarquer que son élection, imposée par les Turcs aux Hongrois, détacha précisément la Transylvanie de la Porte. En effet, il laissa gouverner son premier ministre, Michel Teleki, lequel parvint à placer la principauté sous la protection de l’Autriche. L’empereur, dans un traité solennel et qui n’en fut pas moins violé,