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cris « Mère, mon collier !… Mère, ma broche ! » dont la maison retentissait. Chaque fois que l’hôtesse passait devant moi, je disais modestement : « Madame, mon poulet frit, mes œufs !… » Je n’étais pas entendu : les angoisses de la mère faisaient taire la bonne volonté de l’hôtesse. Je ne trouvai pas d’autre moyen d’abréger les choses que de lui transmettre l’une après l’autre les demandes que toutes répétaient à la fois d’une façon étourdissante. Ma patience fut dignement récompensée. L’hôtesse conçut une très grande estime de ma personne, au point de présider elle-même aux intéressants détails que nécessitait ma présence. Elle me fit même l’honneur de me confier ses espérances de mère. Ses filles n’allaient pas à un bal, mais à un examen… Le maître à danser avait invité toutes ses élèves, dans l’intention de donner un prix à celle qui lui ferait le plus d’honneur.

« Que les temps sont changés ! s’écria un vieillard qui voyait partir la troupe des danseuses, mon grand père parlait encore de la peste et des Tatars ; on n’y pense plus aujourd’hui. » Le vieillard disait vrai. Je me rappelai que Sigismond Báthori avait dévasté Schœsbourg, et je me souvins des combats qui ensanglantèrent cette cité quand la ville haute tenait pour Bartsai, et la ville basse pour Georges Rákótzi, lesquels se disputaient la couronne.

Le seul nom de Schœsbourg rappelle un sanglant