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questions les plus bizarres sur les hommes, sur les femmes, voire même sur le ciel de ma patrie. Leur curiosité était singulièrement excitée : elles voulaient aller « là-bas ». — Mais, reprenait-on, on y parle une langue que vous ne savez pas. — Et vous, comment faites-vous donc ? — Nous la savons. — Eh bien, nous parlerons avec vous ; d’ailleurs nous apprendrons cette langue-là. — Et puis il faut voyager pendant trois semaines. — Quoi ! le monde est-il donc si grand ? demanda l’une. Mon frère a marché huit jours en vendant des tableaux : au bout de ce temps il a rencontré une montagne, où un soldat lui a dit qu’on ne pouvait plus avancer. Est-ce que la terre ne finissait pas là ? — C’est la Transylvanie qui finit là. Avec un passe-port ton frère eût pu marcher des années entières. »

C’est à l’aide du daguerréotype qu’ont été obtenus la plupart des dessins placés dans cet ouvrage. Quand les Valaques voyaient fonctionner l’instrument magique, ils ne doutaient pas qu’il n’y eût là quelque diablerie. Ils refusaient obstinément de poser : l’œil formidable de la machine ne pouvait-il pas jeter un sort ? Lorsqu’à la fin ils se persuadaient qu’on pouvait s’exposer sans péril, ils consentaient à rester immobiles dans la pensée que leur portrait irait fort loin. Nous débutâmes par un attelage de buffles qui était venu stationner sous nos fenêtres. Le paysan qui les menait eut l’ordre de ne pas bouger, et il vit placer devant lui quelque chose que l’on