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rendre Tököli suspect à la noblesse, et la défection paralysa souvent les ressources des révoltés. Le principal obstacle que Tököli eût à surmonter, c’était l’aveugle obstination des Turcs, auxquels il répugnait d’obéir franchement, et qui ne faisaient les choses qu’à demi. Un seul homme commandait à Vienne ; aussi à la longue les Impériaux reprirent-ils l’avantage. En 1688 Louis XIV annonçait hautement son intention de soutenir les Hongrois, et d’employer toutes les forces de la France contre l’empire, lorsque l’avènement de Guillaume d’Orange sur le trône d’Angleterre le détourna de ses desseins. Il se déclara l’ennemi de la Grande-Bretagne, et la guerre d’Allemagne ne fut plus que secondaire. Les Impériaux le sentirent ; aussi, malgré les victoires des Français, la prise de Philipsbourg, de Spire, de Worms, et la conquête du Palatinat, pas un régiment autrichien n’abandonna la Hongrie pour couvrir l’Autriche : on savait à Vienne qu’on pouvait compter sur l’Angleterre. Cependant le roi de France ne laissa pas que de venir en aide à Tököli, et les troupes des mécontents étaient régulièrement payées, lorsque depuis plusieurs mois ni les Impériaux ni les Turcs ne recevaient de solde. C’était prolonger une résistance inutile : le triomphe des Impériaux était dès cette époque assuré.

On vit alors un étrange spectacle. Un peuple brave et belliqueux, combattant pour son indépendance, ayant à sa tête un homme de génie, forcé de se soumettre à