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heureux pays. Appauvrie, dépeuplée, la Transylvanie passa par les plus cruelles calamités. En 1601 la famine était telle, qu’on dévorait à Fejérvár les cadavres détachés de la potence. Dans cette année funeste, aucun enfant ne naquit. Tous moururent dans le sein de leurs mères.

Lorsque Soliman sépara la Transylvanie de la Hongrie, il laissa le gouvernement de cette province entre les mains d’Isabelle, fille du roi de Pologne, et veuve de Jean Zápolya. Sous le nom de cette princesse régna Georges Martinuzzi. Celui-ci, Hongrois de naissance, était d’une famille illustre et ruinée. Il avait passé sa jeunesse dans le château de Hunyad, en Transylvanie, vivant parmi les montagnards. Il était âgé de vingt-quatre ans lorsque son frère et son père perdirent la vie en combattant les Turcs. L’esprit frappé de ces événements, il dit adieu au monde, et entra dans le couvent de Saint-Paul l’Hermite, près de Bude. Il y apprit à lire, se fit enseigner le latin, la théologie, et acquit en peu de temps une telle réputation de science et de vertu, que les religieux d’un monastère de Pologne le choisirent d’une voix pour leur abbé. Retiré dans ce pays après la défaite de Tokay, Zápolya ne manqua pas de le consulter. Martinuzzi adressa au prince des paroles d’encouragement, offrit de parcourir lui-même la Hongrie, de réveiller le patriotisme de la noblesse et du clergé, et partit chargé des pleins pouvoirs