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matin tout trempés. On appela un magnat des environs, connu par sa piété, et on lui montra l’image. Le seigneur l’admira comme il convenait ; cependant il ne pouvait s’expliquer pourquoi le petit Jésus, qui était représenté à côté de la Vierge, ne pleurait pas comme le comportait sa nature d’enfant. Il lui fut répondu que la Vierge pleurait et intercédait pour la Transylvanie. En conséquence il fit transporter l’image dans la chapelle de son château, tandis que la foule se pressait sur la route, et que le régiment de Hohenzollern, en grande tenue et enseignes déployées, faisait trois décharges de mousqueterie.

L’événement ne pouvait manquer de faire du bruit. On nomme des commissaires chargés de vérifier le miracle. Ces commissaires, que l’on choisit entre les Jésuites, se voient forcés de reconnaître que les larmes sont réelles. Dès lors tous les doutes cessent, et les révérends pères s’adjugent la possession du tableau. En effet, ils se souviennent tout à coup, et comme par hasard, que dans leurs églises de Hongrie, d’Autriche, de Bavière et de Tyrol, on expose des vierges qui parlent, des crucifix auxquels la barbe croît en une nuit, etc. ; qu’eux-mêmes n’ont rien à offrir à la piété des fidèles. Mais ils avaient trop bien fait les choses : car les paysans valaques de Szent Miklós, qui venaient d’embrasser le catholicisme, tenaient si fort à leur madone, qu’il fallut la leur rendre. Ils ne s’apaisèrent que lorsqu’ils virent