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LE GUIDE CULINAIRE

Mais outre que, dans ces cas, il s’agit le plus souvent de Hors-d’œuvre de luxe, comme : caviar, huîtres, œufs de vanneau, etc., qui n’ont pas autant d’influence sur la dégustation de ce qui suit que les Poissons, Salades, ou Légumes marinés, il est à remarquer que, la plupart du temps, leur emploi n’est qu’un expédient destiné à faire patienter le convive pendant la préparation des articles qu’il a commandés.

L’usage des Hors-d’œuvre froids peut donc, dans ce cas, se justifier jusqu’à un certain point.

Il est seulement regrettable que cet usage ait dégénéré en habitude et que l’on y ait recours dans maintes circonstances, où rien ne le recommande.

Dans la responsabilité de cet abus, on doit faire une large part à l’engouement qui sévit, à une certaine époque, pour les choses de Russie.

On sait que, en Russie, la coutume est de dresser, dans une pièce voisine de la salle à manger, un buffet garni de nombreuses et diverses pâtisseries spéciales, poissons fumés, etc., que les convives dégustent debout, en buvant des liqueurs fortes, en attendant de prendre place à table.

L’ensemble des diverses préparations qui constituent cette sorte de prologue au repas, est désigné sous le nom de Zakouskis.

Des amphitryons et des Maîtres d’hôtel, plus zélés que logiques, instaurèrent chez nous la mode des Zakouskis, sans tenir compte de la différence que l’influence des climats établit, entre les races, au point de vue du goût, des habitudes, et des tempéraments.

Il est vrai que, à part de très rares exceptions, les articles servis n’avaient de Zakouskis que le nom : ils se composaient tout simplement de Hors-d’œuvre froids ordinaires, servis sur la table même de la salle à manger, ce qui était déjà une entorse donnée au principe.

On finit heureusement par comprendre le ridicule qu’il y avait à affubler d’un nom si étrange (presque barbare), une chose aussi simple et commune que les Hors-d’œuvre froids, et il est bien rare de trouver maintenant, dans les menus, ce vocable russe.

Nous estimons, quant à nous, que les Hors-d’œuvre froids n’ont aucune raison d’être dans un dîner ; que leur emploi est contraire à la logique, et ne peut avoir pour résultat que d’atténuer la saveur des Potages.

Tout au plus, pourrait-on faire une exception en faveur du caviar, dont la saveur de noisette, quand il est bien frais, ne peut