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Giboyer.

Il ne voudra peut-être se décider que sur échantillon. Si je vous brochais d’ici à ce soir une tartine de Déodat ?

Le Marquis.

Possédez-vous assez sa manière ?…

Giboyer.

Parbleu ! pour m’en servir en la définissant, elle consiste à rouler le libre penseur, à tomber le philosophe, en un mot, à tirer la canne et le bâton devant l’arche. Un mélange de Bourdaloue et de Turlupin ; la facétie appliquée à la défense des choses saintes : le Dies iræ sur le mirliton !

Le Marquis.

Bravo ! tournez ces griffes-là contre nos adversaires, et tout ira bien. — Dites-moi, vous sentez-vous en état d’écrire un discours de tribune ?

Giboyer.

Oui-da ! je tiens aussi l’éloquence ; mais c’est à part.

Le Marquis.

Bien entendu. Et quel pseudonyme prendrez-vous ? Car vous ne pouvez nous servir sous votre nom.

Giboyer.

C’est clair ; et cela me va de toutes les façons. L’enfant ne saura pas que c’est moi ; et puis j’avais exprimé dans son verre tout le jus de l’ancien Giboyer ; passons à un autre. Aussi bien j’en ai assez de ce pauvre hère à qui rien ne réussit, qui n’a pas trouvé moyen d’être un homme de lettres avec son talent et un honnête homme avec ses vertus… Faisons peau neuve ! et vive M. de Boyergi !