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Madame Bernier.

Tu ne te doutes pas, ma chère enfant, des servitudes de la richesse ; c’est moi qui les subis depuis la mort de ton pauvre père ; il est juste que mon gendre me relaye. J’ai reçu une lettre de Touraine ; mon fermier des Moulineaux m’écrit que la commune me cherche de mauvaises querelles ; elle veut étendre son pré communal à mes dépens ; le tout embrouillé d’une question de prescription, la bouteille à l’encre ; d’un autre côté, mon notaire trouve enfin un acquéreur pour le moulin des Brossettes ; à toutes ces causes, il est bon que nous ayons quelqu’un sur les lieux. Or, j’hésitais par respect pour la lune de miel à mettre Pierre en campagne ; j’ai reculé tant que j’ai pensé que nos intérêts seuls souffraient de son désœuvrement, mais, puisqu’il en souffre aussi, tout est pour le mieux ; il partira demain.

Clémentine.

À la bonne heure !… Et combien de temps durera son absence ?

Madame Bernier.

Quinze jours ou trois semaines.

Clémentine.

Bon, jusqu’à notre départ pour l’Italie.

Madame Bernier.

Tu penses donc toujours à ce voyage ?

Clémentine.

Plus que jamais. Il faut espérer que monsieur mon mari n’aura pas le temps d’avoir des lubies en route. Est-ce que tu n’es plus en humeur vagabonde, toi ?