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À la foule j’apporterai des désillusions, à certains j’enlèverai du prestige ; de celle-là et de ceux-ci je n’attends pas des applaudissements.

Certains chefs, quelques-uns civils, d’autres militaires, furent abominables dans leur conduite à l’égard des indigènes de Madagascar. J’ai attendu plus de vingt ans avant de le proclamer, parce que je voulais que par la mort ou la retraite, les coupables eussent disparu, que la prescription supprimât les peines méritées, ne laissant que la honte. J’ai voulu ainsi que mon récit prit une importance documentaire d’ordre supérieur, s’élevât au dessus des questions de personnes, devînt une leçon de choses s’imposant aux directeurs de notre expansion coloniale, et si ceux-ci ne le voulaient comprendre, à une opinion publique en état de les dominer.

Je m’attends à être traité d’ennemi des colonies. J’en suis au contraire un partisan déterminé. Partisan de la colonisation pratiquée dans l’intérêt de la Nation tout entière et non pour le plus grand avantage de quelques-uns (colons privilégiés, fonctionnaires civils ou militaires), j’y vois une source de bien-être, un réservoir de matières premières, un accroissement de population, des bénéfices aussi importants que divers.

Mais la première condition d’une colonisation intelligente et productive, c’est d’avoir avec soi la population indigène.

À part l’Afrique du Nord et la Nouvelle-Calédonie, aucune de nos possessions coloniales n’est colonie de peuplement, un pays dans lequel des Français transplantés puissent vivre et travailler comme en France. D’ailleurs avec notre faible natalité, que ferions-nous de colonies de peuplement ?