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l’un de mes compagnons qui, d’un coup de fusil lui cassa l’aile. Quand nous l’eûmes pris à bord, il fut attaché sur le pont de notre bateau, au moyen d’une corde, et nous le nourrîmes de chair de roussette, dont il ne commença à manger quelques morceaux que le troisième jour de sa captivité ; mais comme il devint bientôt un camarade très désagréable et, qui plus est, dangereux, cherchant en toute occasion à nous frapper l’un ou l’autre de ses serres, nous l’achevâmes, et il fut jeté par-dessus le bord.

Lorsque ces oiseaux se sont laissé surprendre, ils deviennent excessivement couards. Alors on les voit s’enlever brusquement et d’une seule fois, et fuir en volant très bas et en zigzags, jusqu’à une certaine distance, tout en poussant une sorte de sifflement qui ne ressemble plus du tout à cet éclat de rire désagréable qu’ordinairement ils savent imiter. On peut les approcher facilement, quand on n’a pas de fusil ; mais l’usage de cet instrument leur est apparemment bien connu, puisqu’ils évitent avec grand soin de laisser venir trop près toute personne qui en porte un avec elle. Malgré toutes ces précautions, on en tue beaucoup en les joignant, soit à couvert sous un arbre, soit à cheval ou dans un bateau. Mais ils n’ont point la faculté d’éventer la poudre, comme on est assez absurde pour le dire et le croire de la corneille et du corbeau. Ils ne savent pas davantage prévoir l’effet des chausse-trappes, car j’y en ai vu plus d’un de pris.

Leur vue, bien que probablement aussi parfaite que celle d’aucun autre oiseau, perd beaucoup de son action