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sur le toit de la maison où il demeurait jusqu’à l’aurore. Quand il eut deux ans, il commença à voler dans les bois, y passant la plus grande partie du jour, pour ne revenir à l’enclos que quand la nuit approchait. Il continua ce genre de vie jusqu’au printemps suivant où je le vis plusieurs fois s’envoler de son perchoir, sur la cime d’un grand cotonnier, au bord de l’Ohio, puis après s’y être un moment reposé, reprendre son essor jusqu’à la rive opposée, bien que la rivière, en cet endroit, n’eût pas moins d’un demi-mille de large ; mais toujours il revenait à la tombée de la nuit. Un matin, de très bonne heure, je le vis s’envoler vers le bois, dans une autre direction, mais sans faire grande attention à cette circonstance. Cependant, plusieurs jours se passèrent, et l’oiseau ne reparut plus.

Quelque temps après, j’étais à la chasse, me dirigeant vers certains lacs aux environs de rivière Verte. J’avais fait à peu près cinq milles, lorsque j’aperçus un bel et gros dindon qui traversait le sentier devant moi, et s’en allait en se prélassant tout à son aise. C’était le moment où la chair de ces oiseaux est dans sa vraie primeur, et je lançai mon chien qui partit au galop. Il approchait déjà du dindon, et je voyais à ma grande surprise, que celui-ci n’avait pas beaucoup l’air de s’en émouvoir. Junon allait sauter dessus, quand soudain elle s’arrêta et tourna la tête vers moi. Je courus, et jugez de mon étonnement, lorsque je reconnus mon oiseau favori lequel, ayant lui-même reconnu le chien, n’avait pas voulu fuir devant lui ; bien qu’assurément la vue d’un chien étranger n’eût pas manqué de lui