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dans mon opinion, il n’y a pas de méthode qui vaille celle qu’employait M. Égan, le pilote de l’île Indienne.

Ce pêcheur émérite était muni d’un instrument de fer qu’il appelait une cheville, et qui présentait à chaque extrémité une pointe assez semblable à ce que les faiseurs de filets appellent un clou sans tête, étant quadrangulaire, mais aplatie, et figurant à peu près le bec du pic à bec d’ivoire, y compris son cou et ses épaules. Donc, entre les deux épaules de cet instrument, une ligne fine, très serrée, et longue de cinquante toises ou plus, est assujettie par l’un des bouts, au centre de la cheville où se trouve pratiqué un trou dans lequel elle passe, tandis que le surplus, soigneusement enroulé, est placé dans une partie convenable du canot. Maintenant, l’une des extrémités de la cheville entre dans un étui de fer qui la retient lâchement attachée à un long épieu de bois, jusqu’à ce que la carapace de quelque tortue ait été transpercée par l’autre pointe. L’homme de la barque, aussitôt qu’il aperçoit une tortue se réchauffant à la surface de l’eau, joue des rames pour s’en approcher le plus silencieusement qu’il peut ; et quand il n’en est plus qu’à dix ou douze mètres, il lance l’épieu comme pour atteindre l’animal à cette place que choisirait un entomologiste, s’il voulait piquer quelque gros insecte à une plaque de liége. À peine la tortue est-elle frappée, que le manche de bois se sépare de la cheville à laquelle, comme je l’ai dit, il ne tient que très légèrement. L’animal, fou de douleur, se débat convulsivement ; et il paraît que plus la cheville reste dans la blessure, plus elle s’y enfonce,