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balance entre les deux cimes, tant ses ondulations sont élégantes. C’est à ce moment qu’il étale toute la beauté de son plumage, et charme les yeux. Jamais, tant qu’il est sur ses ailes, il ne pousse aucun cri, sauf dans la saison des amours ; mais en tout temps, dès qu’il vient de se poser, on entend sa voix si remarquable. Grimpant soit contre le tronc des arbres, soit le long des branches dont il gagne toujours le sommet, il avance par petits sauts, et chacun est accompagné d’une note claire, aiguë, et néanmoins assez plaintive, qui se prolonge au loin, quelquefois à un demi-mille, et retentit comme le fausset d’une clarinette. C’est une sorte de pait, pait, pait, ordinairement répété par trois fois de suite, et si souvent, que de toute la journée, c’est à peine si l’oiseau reste un moment silencieux. Cette habitude lui devient funeste, car elle révèle sa présence à ses ennemis ; et si l’on cherche à le détruire, ce n’est pas, comme on le suppose, parce qu’il ferait mourir les arbres, mais parce qu’il est un bel oiseau, et parce que la riche peau qui lui recouvre le crâne forme un ornement pour l’habit de guerre de nos Indiens et le sac à balles des pionniers et des chasseurs. Les voyageurs de tous pays recherchent aussi beaucoup la partie supérieure de la tête et le bec du mâle. Lorsqu’un steam-boat s’arrête à l’un de ces lieux que dans le pays on appelle wooding places[1], il n’est pas rare de voir des étrangers donner un quart de dollar pour deux ou trois têtes de ce pic ; souvent j’ai pu admirer des bau-

  1. Un dépôt de bois.