Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/408

Cette page a été validée par deux contributeurs.

où j’ai représenté ce grand pic, incontestablement le premier de sa tribu.

Le pic à bec d’ivoire confine ses excursions dans une portion comparativement très restreinte des États-Unis. De mémoire d’homme, on n’en a jamais vu fréquenter les États du centre ; c’est qu’aussi, dans aucune partie de ces districts, la nature des bois ne paraît convenir à ses singulières habitudes.

Quand on descend l’Ohio, il ne commence à se montrer que près du confluent de cette rivière avec le Mississipi ; puis, en suivant ce dernier fleuve, soit par en bas, vers la mer, soit en remontant dans la direction du Missouri, le splendide oiseau se rencontre déjà plus fréquemment. Sur les côtes de l’Atlantique, il ne dépasse pas la Caroline du Nord, bien qu’on puisse encore en voir quelques-uns dans le Maryland. Mais à l’ouest du Mississipi, et même depuis la pente des montagnes Rocheuses, il se trouve dans toutes les épaisses forêts, au bord des rivières qui déchargent leurs eaux dans ce fleuve majestueux. Les parties basses des Carolines, de la Géorgie, de l’Alabama, de la Louisiane et du Mississipi, sont ses retraites favorites. Il réside constamment dans ces États, y élève sa famille et passe sa vie tranquille et heureux, trouvant de la nourriture à profusion, au milieu de ces marais sombres et profonds dont le pays est entrecoupé.

Il faudrait, cher lecteur, que je pusse figurer à votre esprit ces lieux redoutables, séjour préféré du pic à bec d’ivoire ; il faudrait vous décrire l’immense étendue de ces marécages que recouvre l’ombre funèbre de milliers