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la volée. Quand ils ont rencontré une rivière, on les voit gagner les plus hautes éminences aux environs, et souvent demeurer là tout un jour, quelquefois deux, comme pour délibérer. Tant que cela dure, on entend les mâles glouglouter, appeler et faire grand bruit ; ils s’agitent, font la roue, comme s’ils cherchaient à élever leur courage au niveau d’une si périlleuse aventure ; même les femelles et les jeunes se laissent aller parfois à ces démonstrations emphatiques : elles étalent leur queue, tournent l’une autour de l’autre, font entendre un bruit sourd[1], et exécutent des sauts extravagants. À la fin, quand l’air paraît calme et qu’autour d’elle tout est tranquille, la bande entière monte au sommet des plus hauts arbres, d’où, à un signal consistant en un simple cluck, cluck, donné par le chef de file, les voilà qui s’envolent vers la rive opposée. Les vieux, et ceux qui sont en bon état, l’atteignent aisément, dût la rivière avoir un mille de large ; mais les jeunes et les moins robustes tombent fréquemment à l’eau, où cependant ils ne se noient pas, comme vous pourriez le croire ; ils ramènent leurs ailes tout près du corps, étendent leur queue pour se soutenir, allongent le cou, et détachant à droite et à gauche de vigoureux coups de patte, nagent rapidement vers le bord. En approchant, s’ils le trouvent trop escarpé pour prendre terre, ils cessent un moment tous leurs mouvements, et se laissent aller au courant jusqu’à quelque endroit abordable, et arrivés là, par un violent effort, parviennent générale-

  1. « Purring. » Proprement le bruit d’un chat qui file.