Page:Audubon - Scènes de la nature, traduction Bazin, 1868, tome 1.djvu/369

Cette page a été validée par deux contributeurs.

nir leur nid, et le rendirent plus chaud en y ajoutant quelques moelleuses plumes d’oie qu’ils ramassaient le long de la crique. Leur chant alors, quand ils se rencontraient sur le bord du nid, se faisait remarquer par un petit gazouillement et des accents de joie que je n’ai jamais entendus dans aucune autre occasion : c’était, je m’imagine, la douce, la tendre expression du plaisir qu’ils se promettaient, et dont ils semblaient jouir par anticipation sur l’avenir. Leurs mutuelles caresses, si simples peut-être pour tout autre que moi, la manière délicate dont le mâle savait s’y prendre pour plaire à sa femelle, m’empêchaient d’en détacher mes yeux, et mon cœur en recevait des impressions que je ne puis oublier.

Un jour, la femelle demeura très longtemps dans le nid ; elle changeait fréquemment de position, et le mâle manifestait beaucoup d’inquiétude. Il descendait par moments auprès d’elle, se plaçait un instant à ses côtés, puis soudain se renvolait, pour revenir bientôt avec un insecte qu’elle prenait de son bec avec un air de reconnaissance. Environ vers trois heures de l’après-midi, le malaise de la femelle parut augmenter ; le mâle aussi témoignait d’une agitation qui n’était pas ordinaire, lorsque tout à coup la femelle se haussa sur ses pieds, regarda de côté sous elle, puis s’envola suivie de son époux attentif, et prit son essor haut dans les airs, en accomplissant des évolutions bien plus curieuses encore que toutes celles que j’avais observées. Ils passaient et repassaient au-dessus de l’eau, la femelle conduisant toujours le mâle qui reproduisait, après elle, toutes les