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LA GRIVE ROUSSE.


Lecteur, regardez avec attention la planche qui est là, devant vos yeux, et dites si la scène que j’ai essayé de reproduire n’est pas faite pour inspirer l’intérêt et la pitié ? Peut-on se vanter d’être sensible à la mélodie de nos bois, sans éprouver de la sympathie pour le généreux courage de ce mâle qui défend si fièrement son nid, et déploie toutes ses forces pour arracher sa femelle bien-aimée des replis du hideux serpent qui bientôt déjà l’a privée de la vie ? Voyez : un autre mâle de la même espèce, répondant aux cris de détresse de son camarade, descend en toute hâte au secours des deux infortunés ; le bec ouvert, il est prêt à porter au reptile un coup vengeur ; ses yeux étincelants lancent la haine à son ennemi ; un troisième est aux prises avec le serpent et lui déchire la peau tant qu’il peut. Ah ! si l’alliance de ces nobles cœurs parvient à triompher, ne sera-ce pas une preuve de plus que l’innocence, bien qu’assiégée de périls, finit, avec l’aide de l’amitié, par s’en tirer à son honneur.

Les deux oiseaux, dans le cas actuellement représenté, ont eu déjà grandement à souffrir : leur nid est sens dessus dessous, la couvée perdue et la vie de la femelle dans un danger imminent. Cependant le serpent succombe, il est vaincu, et sur son cadavre une