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parce qu’il aime à mâcher leurs fruits. Au printemps, dès les premiers beaux jours, notre chasseur, imitant le bramement de la daine, parvient souvent ainsi à s’emparer de la mère avec son faon. D’autres fois, comme cela se pratique dans quelques tribus d’Indiens, il plante au bout d’un bâton une tête de daim convenablement préparée, et la promène en rampant, au-dessus des grandes herbes des prairies, si bien que le vrai daim, trompé par l’apparence, se laisse approcher à portée de fusil. Mais, cher lecteur, en voilà sans doute assez pour ce genre de chasse. Permettez-moi seulement d’ajouter que, soit d’une façon, soit d’une autre, c’est par milliers que les daims succombent chaque année. Très souvent on ne les tue que pour la peau, et l’on ne se soucie pas même des meilleurs morceaux, à moins que la faim ou la proximité de quelque marché n’engage le chasseur, comme nous venons de le voir, à emporter les jambons.

La chasse à la torche, ou, comme on l’appelle dans certaines contrées, la lumière des forêts, ne manque jamais de produire une forte impression sur celui qui pour la première fois en est témoin. La scène, par moments, revêt quelque chose de redoutable et de grandiose ; elle jette dans l’âme une véritable frayeur, capable de paralyser, jusqu’à un certain point, les facultés du corps. Suivez donc en effet, sans une sorte de frisson, le chasseur qui galope à travers l’inextricable épaisseur des bois, obligé vous-même de lancer votre cheval par-dessus des centaines de troncs énormes, tantôt vous trouvant enlacé par des lianes vagabondes