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hommes, et la flottille de nouveau fait voile pour le lieu de la pêche.

Il n’y a pas moins de cent schooners ou pinasses dans le port ; or, comme trois cents bateaux partent chaque jour pour les bancs, et que chaque bateau peut prendre en moyenne deux mille morues, quand vient la nuit du samedi au dimanche, c’est à peu près six cent mille poissons qui ont été pris, nombre qui ne laisse pas que de faire un peu de vide dans les premiers parages. Aussi le capitaine profite-t-il de la relâche du dimanche pour rentrer ses barils de sel, qui sont à terre, et se diriger vers un havre mieux approvisionné, où il espère arriver longtemps avant le coucher du soleil. Si la journée est propice, les hommes peuvent se donner du bon temps durant la traversée, et le lundi on recommence comme de plus belle.

Je ne dois pas omettre de vous dire que, tandis qu’il faisait voile d’un port à l’autre, le vaisseau est passé tout près d’un rocher sur lequel des myriades de puffins ont fait leur nid. Là on s’est mis en panne, pour une heure ou deux ; la plupart des hommes sont descendus à terre et ont recueilli d’immenses quantités d’œufs excellents pour remplacer la crème, comme aussi pour servir d’appât au poisson, quand le feu les a durcis. Je puis vous apprendre, en outre, comment nos aventuriers s’y prennent pour distinguer les œufs frais des autres : ils remplissent d’eau de larges tubes, y plongent les œufs qu’ils y laissent une ou deux minutes, puis rejettent comme mauvais ceux qu’ils voient surnager et même ceux qui manifestent la plus légère dis-