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templées encore que l’œil du misérable Indien, unique habitant, à remonter aux plus hauts âges, de ces splendides et mélancoliques solitudes. Où est l’étranger, je dis celui qui n’a pas vu ma chère patrie, qui puisse se former une juste idée de l’étendue de ses forêts, aux premiers jours ; de la majesté de ces arbres superbes que, pendant des siècles, a fait ondoyer la brise, et qui ont résisté au choc de la tempête ; des larges baies de nos côtes de l’Atlantique, remplies par mille cours d’eau différant de grandeur, comme diffèrent les étoiles au milieu de la pure immensité du firmament ; du contraste si frappant de nos plaines de l’Ouest et de nos rivages sablonneux du Sud entrecoupés de marais couverts de roseaux, avec les rochers escarpés qui protégent nos côtes de l’est ; des rapides courants du golfe du Mexique, et du flot bruyant de la marée dans la baie de Fundy ; de nos lacs océaniens, de nos puissantes rivières, de nos cataractes tonnantes, de nos colossales montagnes élevant leurs têtes blanches de neige au sein des paisibles régions d’un air limpide et glacé. Oh ! que ne puis-je vous esquisser ici les beautés si variées de ma terre chérie !… Mais ne voulant point, n’ayant jamais voulu me lancer dans des descriptions d’objets au-dessus de ma portée, du moins laissez-moi vous dire tout ce que je sais de ceux que j’ai admirés dans ma jeunesse ; que j’ai étudiés, étant homme, et pour l’acquisition desquels j’ai bravé les chaleurs énervantes du Sud, les froids engourdissants du Nord ; pénétré dans l’inextricable marais de roseaux ; foulé le sentier douteux de la forêt silencieuse, pagayé