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deux hommes vigoureux armés chacun d’une carabine. D’un saut je suis sur pied, en leur criant qu’il était grand temps qu’ils arrivassent. Leur raconter tout, fut l’affaire d’un instant. D’abord on s’assura des deux ivrognes ; puis la femme, en dépit de sa résistance et de ses vociférations, subit le même sort. L’Indien ne se contenait plus et dansait de joie. Il nous donna à entendre que la douleur l’ayant empêché de dormir, il n’avait cessé d’avoir l’œil sur nous. On peut croire que nous ne songeâmes guère au sommeil ; nous passâmes le reste de la nuit à causer ; et les deux étrangers me racontèrent une aventure où ils s’étaient eux-mêmes trouvés dans une semblable situation. Enfin parut l’aurore brillante et vermeille, amenant l’heure du châtiment pour nos prisonniers.

Maintenant, ils étaient tout à fait de sens rassis ; on leur délia les pieds, mais les bras restèrent toujours attachés ; nous les poussâmes dans le milieu des bois, et les ayant soumis au traitement que les régulateurs[1]

  1. Ce châtiment consiste, suivant la gravité des circonstances, dans l’injonction de quitter la contrée, avec défense de s’approcher jamais d’aucune habitation ; dans une punition corporelle infligée sur le lieu même, et s’il s’agit de récidive de vol ou bien de meurtre, dans la peine de mort. Quelquefois, pour les cas désespérés, après que la tête a été séparée du tronc, on la fiche sur un pieu pour servir d’exemple aux autres.
    Quant aux juges, ou régulateurs, on désigne ainsi dans les parties éloignées de l’Union, sur les frontières, d’honnêtes citoyens choisis parmi les plus respectables du district et, qui appelés de suite à siéger dès qu’un outrage à la société, ou un crime a été commis, sont revêtus des pouvoirs nécessaires pour punir les coupables et maintenir l’ordre, là où le cours régulier de la justice manquerait son but. — C’est ce