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pas tout à fait aussi abondants qu’on se l’imagine, et je veux vous en donner une preuve.

Le 25 février 1832, je suivais le cours supérieur du Saint-Jean, en compagnie d’un personnage que le gouvernement avait chargé de surveiller l’exploitation des chênes-saules dans cette partie de la Floride orientale et qui, pour sa peine, recevait un bon salaire. Tout en côtoyant l’un des bords si pittoresques de cette rivière, mon compagnon me montra du doigt, sur l’autre rive, quelques gros bouquets d’arbres au feuillage foncé, qu’il me dit être entièrement composés de chênes-saules. Moi, je n’étais pas de son avis, et comme la controverse s’échauffait un peu, je lui proposai de nous faire conduire en bateau jusqu’au lieu en question, pour examiner de près le bois et les feuilles, et vider notre différend. Bientôt nous abordâmes, et vérification faite, il ne se trouva pas un seul pied de l’espèce prétendue, mais des milliers de chênes des marais[1]. L’inspecteur reconnut qu’il s’était trompé, et moi je continuai à chercher des oiseaux.

Par une sombre soirée, je me trouvais assis sur le bord de la même rivière, réfléchissant aux arrangements que je pourrais prendre pour la nuit. Il commençait à pleuvoir à verse lorsque, par bonheur un homme m’aperçut et, venant à moi, m’offrit l’hospitalité de sa cabane qui, m’assurait-il, n’était pas éloignée. J’acceptai sa bienveillante invitation et le suivis. Dans l’humble logement, je trouvai sa femme, plusieurs

  1. Swamp-oak (Quercus bicolor).