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ceux du canal Saint-Martin ; seulement ici ils étaient tirés par des chevaux, tandis qu’à Paris c’étaient des hommes qui les tiraient pour leur faire passer l’écluse. On les voyait toujours attelés comme des chevaux, par deux ou par quatre, l’un derrière l’autre ; leurs épaules étaient entourées d’une large sangle qui ressemblait à un licol, et ils tiraient comme les chevaux, en tendant le cou, et en faisant de tout petits pas.

Ici le fleuve coulait entre deux montagnes bien plus hautes que les maisons de Paris ; l’eau en était si claire qu’elle reflétait les montagnes jusqu’au ciel. De l’autre côté du fleuve, trois grosses roches sortaient de la montagne. Les gens du pays les appelaient les « Dames du Fleuve ». Elles n’avaient pas de tête, mais on voyait bien tout de même qu’elles avaient été des dames, parce que leurs robes à gros plis s’étalaient encore jusque sur le pré.