Page:Audoux - Le Chaland de la reine, paru dans Le Matin, 28 décembre 1908.djvu/7

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il y avait aussi la grande usine d’en face qui déversait tant d’eau chaude dans le canal que tout le bassin fumait comme si le feu était au fond. Il l’aimait aussi cette usine qui avait neuf grandes cheminées ; il ne pouvait jamais passer devant sans les compter.

Il y avait des fois où les neuf cheminées fumaient ensemble. Cela formait un gros nuage qui se rabattait et faisait comme un pont par-dessus le bassin.

Puis le grand malheur était arrivé.

Un soir, après l’école, il n’avait pas trouvé son père au bord du canal. Le patron du chaland lui avait dit : « Va-t-en chez vous, mon petit, ton père ne reviendra plus ici. » Et deux jours après la tante Maria était venue le prendre pour l’emmener dans ce pays des Ardennes. Il n’aimait pas sa tante Maria, qui le battait pour tout et pour rien, et qui l’empêchait d’aller voir les chalands qu’il aimait tant. Tous ces chalands ressemblaient à