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Il n’y avait pas bien longtemps qu’il ne réclamait plus d’histoire avant de se coucher. C’était toujours des histoires de marinier que son père lui contait. Il y en avait surtout une qu’il aimait beaucoup et qui commençait comme ça : « Il y avait une fois un marinier, qui avait un chaland si joli, si joli, que toutes les dames et les demoiselles venaient à l’écluse pour le voir passer. »

Il la regrettait cette écluse Saint-Martin. Il la revoyait avec sa passerelle où les gens passaient à la queue leu leu ; il revoyait aussi le grand bassin où les chalands avaient l’air de s’ennuyer comme s’ils étaient en pénitence, et les maisons qui se miraient tout entières dans le canal et qu’on voyait tout à l’envers.