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Les Poulains 51

de jurer ; il voulut que la femme fit un effort pour l'aider, mais elle resta droite et raide à la tète de la jument, en répondant :

— Maintenant qu'il est à vous, prenez-le comme vous pourrez : je ne vous ai pas caché qu'il n'a jamais été attaché.

Les femmes s'apitoyaient sur la petite bête. pendant que le marchand s'avançait sur la pointe de ses gros souliers avec le licol tout grand ouvert au bout de ses deux mains. Il tournait et revenait sur ses pas pour surprendre le poulain, qui lui échappait toujours. C'était un gros homme pesant et maladroit, et Raymond pensait en lui-même qu'il avait l'air d’un ours essayant d’attraper un oiseau.

Cependant, il l'approcha deux ou trois fois de si près que le petit chercha du secours près de sa mère.

Il voulut d'abord se cacher sous son ventre ; puis il essaya de lui monter sur le dos, et comme tout cela était impossible, il se colla coutre elle et roula sa petite tète sous son cou pour y chercher une caresse.

Ce fut à ce moment que le marchand le saisit.

Quand le petit sentit la corde, il sauta des quatre pieds et se jeta de tous côtés=,. et Raymond entendit encore des gens qui disaient :

— Il faudra bien qu'il y vienne : il n'est pas le plus fort.

Le poulain axait reculé jusqu'à un amoncellement de colis, et il restait là, tout en recul, en