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paniers, mais un homme en blouse me dit : « Attendez donc, mademoiselle, je vais les ôter de là », et, pendant que je tenais le panier de fruits qu’il avait sur les genoux, il glissa ses volailles sous la banquette.

Les canards n’étaient pas contents, et cela s’entendait bien ; les poules baissaient la tête d’un air humilié et la femme du paysan leur parlait en les appelant par leur nom.

Quand je fus assise et quand les canards se furent calmés, le voyageur qui était en face de moi demanda an paysan s’il portait ses volailles au marché.

— Non, monsieur, répondit l’homme, je les porte à mon garçon qui va se marier après-demain.

Sa figure rayonnait : il regardait autour de lui, comme s’il eût voulu montrer sa joie à tout le monde.

Une vieille femme qui était enfoncée dans trois oreillers, et qui tenait deux fois sa place, se mit à maugréer contre les paysans qui encombraient toujours les wagons ; le jeune homme qui était à côté d’elle ne savait où mettre ses coudes.

Le train commença à rouler et le voyageur qui avait parlé allait se mettre à lire son journal, lorsque le paysan lui dit :

— Mon garçon est à Paris il est employé dans un magasin et il va se marier avec une demoiselle qui est aussi dans un magasin.

Le voyageur posa son journal ouvert sur ses