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attendre le passage de la voiture, en bas, sur la route, et on la conduirait dans une famille de Saint-Claude qui la mettrait en apprentissage en attendant le retour de son père.

Il fallut la raisonner longtemps avant de lui faire admettre qu’elle ne pouvait rester seule dans sa maison, mais quand enfin elle eut promis de faire ce qu’on lui ordonnait, le gendarme s’en alla, assurant qu’il irait souvent à Saint-Claude porter des nouvelles du prisonnier.

Derrière lui elle pleura presque aussi fort qu’elle avait pleuré pendant la minute où son père était resté comme privé de vie, tachant de rouge le gros arbre contre lequel sa tête avait porté. Elle essayait de se représenter cette famille de Saint-Claude qui devait la recevoir, et son imagination ne lui montrait que des personnes graves et guindées, et des enfants bien habillés qui n’auraient que du mépris pour elle. Et puis elle connaissait la ville de Saint-Claude où son père l’avait menée souvent, et, à l’idée d’aller vivre dans un endroit où il y avait tant de monde, son chagrin devenait plus vif. Elle se souvint cependant de ce