Page:Audoux - La Fiancee.djvu/69

Cette page a été validée par deux contributeurs.

avait le même silence et la même obscurité, mais Valserine ne s’en effrayait pas ; elle savait que les meubles et les objets qui l’entouraient étaient des amis, qu’elle retrouverait chacun à sa place avec la lumière du jour. Ce qui l’inquiétait surtout c’était la crainte que son père ne restât longtemps en prison, car, alors, il lui faudrait vivre seule à la maison, tout comme la mère Marienne qui habitait plus bas, et dont le fils, contrebandier aussi, s’était laissé prendre le mois dernier.

Un autre souci vint la tourmenter. Il lui faudrait, comme à l’ordinaire, partir chaque matin pour l’école qui se trouvait assez loin, et d’où elle ne revenait que le soir. Qui donc, pendant l’absence de son père, allait prendre soin des jolis poussins éclos nouvellement ? Qui donc mènerait brouter la chèvre noire par les sentiers escarpés de la montagne ? Qui donc encore rapporterait de la forêt les fagots de branches mortes qui font un feu si joyeux, et les pesantes souches de sapin qui brûlent sans flammes et laissent un si beau brasier dans la grande cheminée ?

Sa pensée retourna vers la mère Marienne.