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et dont la vente mettait dans leur poche des sommes variables qui leur permettaient de satisfaire de temps à autre quelques fantaisies.

Mais c’était surtout le bois mort qui les attirait. Ils ne se lassaient pas d’augmenter leur provision, et rentraient presque chaque jour courbés sous un énorme fagot. Au voisin qui leur fit remarquer que leur tas de bois dépasserait bientôt la cheminée de leur maison, ils répondirent tranquillement :

— Il y aura toujours des hivers.

De même que leur corps s’était fortifié, leur esprit s’était ouvert, dans les bois. Ils avaient appris à regarder des fleurs et des plantes poussées on ne savait comment et qu’on ne trouvait que là. Ils avaient encore appris à écouter le bruit du vent dans les arbres, le frémissement des herbes au passage d’un petit animal peureux, le cri de détresse d’un oiseau en danger, et le chant d’allégresse de ceux qui vivaient en paix. À cause de cela, peut-être, la vieillesse semblait leur faire grâce des dix années qui s’étaient écoulées depuis leur arrivée dans le village. Seule la mé-