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de l’eau. Ils changèrent la gaule pour un bâton crochu qui rapprochait d’eux les branches, mais celles-ci, ramenées vers le clos plus qu’elles ne pouvaient le supporter, échappaient soudain au bâton, et dans leur brusque redressement frappaient avec force leurs voisines, et leur enlevaient d’un coup toute une panerée de fruits que le courant emportait aussitôt.

La bande de gamins postés sur l’autre rive et qui ne craignait pas l’eau froide se réjouissait de l’aubaine. L’effronté se moquait des vieux, en appelant au festin des camarades imaginaires :

— Ohé ! les amis, venez par ici, on pêche des nèfles.

Vexés, éreintés et déçus, Nestin et Nestine cessèrent la cueillette.

Les jours suivants, lorsque à chaque repas ils mangeaient, comme un fin dessert, deux ou trois nèfles mûries sur la paille, au lieu de s’en réjouir, ils ne pensaient qu’à celles qui leur avaient échappé. Ils y pensaient le soir en se couchant, ils en rêvaient la nuit. Et il arrivait qu’au matin, Nestine disait à Nestin :