Page:Audoux - La Fiancee.djvu/184

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

arrêtée de jouer. Elle comprit soudain que sa mère disait vrai et une grande stupeur tomba sur elle. Elle regarda encore sa mère. Elle vit ses cheveux presque blancs qui essayaient de bouffer aux tempes, elle vit son visage ridé, ses épaules affaissées et ses mains décharnées et elle ne put s’empêcher de dire :

— Mais, maman, tu as cinquante-huit ans !

— Oui, dit Mme  Pélissand. Et après ?

Après ? Après ? Marie ne savait plus quoi dire, des larmes vinrent à ses yeux, pourtant elle dit encore :

— Et moi, maman ?

Mme  Pélissand recula sa chaise ; son regard se fit dur et comme si elle se vengeait d’une méchanceté, elle répondit :

— Toi, ma chère ? Mais tu es assez vieille pour rester seule.

Elle tapota les bas de la corbeille en reprenant :

— Tu me reprochais mes cinquante-huit ans, tout à l’heure, et tu as l’air d’oublier que tu en as trente-sept sonnés.

— Je ne l’oublie pas, dit Marie, mais…

— Mais quoi ? demanda Mme  Pélissand.