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Son mari faisait la contrebande de l’alcool, et cela rapportait gros. Souvent il partait pour plusieurs jours avec sa voiture et ses deux chevaux. Les douaniers le poursuivaient de tous côtés, ce qui le faisait rire et se moquer d’eux.

Mais voilà que pendant une nuit, on ne sait pour quelle raison, le passage à niveau qui se trouvait au fond d’une étroite vallée garda ses barrières fermées. Le contrebandier, qui croyait le passage libre, et le savait dangereux pour lui, arrivait à fond de train sur la route en pente. L’attelage ne put s’arrêter à temps. Il enfonça la première barrière et vint s’écraser contre la seconde. Et peu après on avait relevé le corps du contrebandier plié en deux sous sa voiture.

Valserine n’avait rien trouvé à dire à la mère Marienne après son récit ; mais les jours qui suivirent, les deux femmes se retrouvèrent plus souvent ensemble assises sur le seuil. Et, sans que ni l’une ni l’autre parlât du passé, elles sentaient bien toutes deux que leur malheur si pareil les unissait comme un lien de parenté.