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Et Sandrine en lui tendant les deux mains comme pour le protéger, répondit aussitôt :

— Mon Jacques.

Ils restèrent un long moment à se regarder.

Le visage de Jacques exprimait une tendresse si profonde, qu’il me vint à l’idée qu’il n’y avait rien de changé entre eux. Mais cela s’effaça vite, car tous deux se mirent à pleurer lamentablement.

Sandrine ne fit aucun reproche. Elle dit seulement à travers ses larmes :

— Comment vais-je faire pour élever les enfants ?

Jacques voulut parler aussi, mais les mots qu’il avait à dire sortaient difficilement de sa bouche.

Sa voix restait au fond de sa gorge, et il pressait davantage les mains de son amie, comme si cela suffisait à le faire comprendre. Puis il se mit à tirer sur le dossier d’une chaise dont les pieds se trouvaient retenus par la traverse de la table. Il tirait fortement, et quand il eut réussi à sortir la chaise il respira avec satisfaction comme s’il venait de faire une chose absolument nécessaire. Peu après, il reprit son air craintif, et il regarda vers la porte avec un mouvement qui lui fit tendre le dos.

Sandrine ne chercha pas à le retenir, mais au moment où il la quittait pour aller rejoindre sa nouvelle femme, elle lui lustra du bout des doigts