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— Comment dites-vous cela ?

Mais Bergeounette l’avait nargué :

— Je dis comme ça, Monsieur. Et vous ne pourrez pas le répéter, parce que les gens du Midi ne sauront jamais prononcer ce mot-là.

Le patron avait ri au lieu de se fâcher, et il avait cédé à l’entêtée en l’appelant : tête de Bergeounette.

Elle continuait à montrer le même entêtement pour tout ce qui n’était pas son idée.

Les cris furieux du patron ou les douces remontrances de sa femme n’avaient aucune prise sur elle ; et il fallait toujours lui céder à la fin.

En dehors de ce défaut qui amenait souvent des disputes, elle était toujours prête à rendre service aux autres. De plus, elle était d’humeur égale et ne cherchait jamais les querelles. Sa grande joie était d’être écoutée, quand elle parlait de sa Bretagne, elle disait :

— La lande est grise, mais les ajoncs fleuris sont plus jaunes que les genêts.

Elle parlait de la mer comme d’une personne qu’elle aurait aimée tendrement.

— Quand j’étais petite, disait-elle, je courais sur les rochers pour mieux la voir, et lorsqu’elle se mettait à écumer, je croyais qu’elle s’habillait en blanc pour une fête, et que toutes les vagues la suivaient en procession.

Par les jours de grand vent, Bergeounette ressentait une véritable inquiétude et ne manquait jamais de nous dire :