Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/266

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour lui emprunter une petite somme dont elle avait besoin sur l’heure. Aussitôt, j’avais vu les traits de Clément se durcir et ses prunelles devenir fixes. Il avait posé son fardeau de mauvaise grâce, et compté une à une les pièces blanches en les faisant sonner sur la table, puis en reprenant la chaise et les tabourets, il avait dit d’un ton sec à sa tante :

— Tu n’oublieras pas de me rendre cet argent qui est à moi.

Le beau regard de Mme  Dalignac avait eu comme un chavirement. Elle avait fait oui de la tête, en essayant de sourire, puis elle s’était levée pour aider son neveu qui passait difficilement la porte avec son chargement, et quand enfin elle avait pu sourire elle s’était tournée vers moi pour me dire :

— Il est bien mal luné, aujourd’hui, notre Clément.

Ma rancune ne voulait pas s’apaiser. Je ne pouvais éloigner de ma pensée les yeux fixes de Clément, et c’était sans joie que je regardais ma robe blanche étalée sur le mannequin. Le roulement d’un tramway me rappela que nous devions partir à Bagneux de bonne heure, et aussitôt j’éveillai Mme  Dalignac.


Dans la grande allée du cimetière il n’y avait personne d’autre que nous, et une frayeur me vint à entendre le bruit de nos pas sur le gravier. Mme  Dalignac marchait vite et me dépassait. Elle