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et Clément chez Rose. Ces soirées du dimanche passées en famille ne me laissaient jamais de regret. Églantine m’embrassait comme une sœur très affectueuse. Les enfants me recevaient avec des cris joyeux, et Rose fraîche et parée me semblait plus belle que les plus belles fleurs du Luxembourg. Elle aussi me recevait affectueusement. Elle n’était pas très flattée de m’avoir pour belle-sœur, mais elle m’aimait à cause de ma ressemblance avec Églantine.

J’avais toujours entendu parler de cette ressemblance sans y apporter la moindre attention. Mais ce soir, parce que Rose insistait en faisant des comparaisons, une curiosité me vint, et je levai le nez vers une glace qui reflétait toute la famille autour de la table et me renvoyait mon image.

Je restai tout d’abord stupéfaite de ma pâleur, et j’eus l’impression que je me voyais pour la première fois.

C’était à moi ce visage aux traits si réguliers qu’il me faisait penser à des lignes tracées sur du papier blanc ?

Non, je ne ressemblais pas à Eglantine dont le teint était rosé comme celui de sa sœur et qui avait le front très haut. Ses joues minces avaient bien la même forme que les miennes, et son menton une fossette toute pareille, mais ses yeux, bleus comme les miens, me rappelaient ceux de Mme  Dalignac. Et si ses cheveux trop lourds croulaient aussi de tous côtés, la nuance en était plus unie et beaucoup plus claire.