Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/229

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— C’est parce que vous vivez trop bien que, moi, je crève.

Ses yeux étaient effrayants dans sa face maigre, et elle fut prise de défaillance avant d’être au bout de sa colère.

Mme  Dalignac restait comme clouée à sa place. Cependant elle leva un doigt, et me dit :

— Donnez-lui un verre d’eau sucrée.

La malade but lentement, avec des hoquets de suffocation, puis elle cracha la dernière gorgée aux pieds de Mme  Dalignac en disant d’un ton haineux :

— Tenez, mauvaise femme, le voilà votre verre d’eau sucrée.

Et comme elle se retournait trop brusquement pour partir. Mme  Dalignac allongea vivement le bras pour la préserver du coin de la table.


Mme  Doublé ne s’étonnait pas moins que Clément de voir sa belle-sœur rester confectionneuse. Depuis longtemps déjà, elle offrait à Mme  Dalignac une association qui, selon elle, assurerait à toutes deux une grosse clientèle et une vie très confortable.

Mme  Dalignac serait là pour créer les modèles et faire les essayages, et Mme  Doublé tiendrait les comptes et s’occuperait des ouvrières.

Tout de suite après la mort du patron, elle était devenue notre voisine. Mme  Doublé, et sur sa porte qui s’ouvrait tout à côté de la nôtre on pouvait lire en lettres d’or ces deux noms accouplés :