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les oiseaux venaient de toute part se nicher dans leurs branches. On les entendait pépier tous à la fois comme si chacun d’eux rendait compte de ce qu’il avait fait dans la journée. On entendit aussi des cris furieux et toute une troupe s’envola. Quelques-uns seulement revinrent aux branches, et aussitôt le calme se fit.


Le soleil s’en était allé en emportant sa lumière, mais avant que l’obscurité ne fût venue, une autre clarté se leva en face du couchant. Une clarté mystérieuse et voilée qui grandissait timidement comme une chose défendue. Et soudain la lune apparut au faite du coteau. Elle était énorme et jaune et sa face toute barbouillée de noir avait l’air de se pencher prudemment pour s’assurer que rien ne viendrait gêner son passage au cours de la nuit. Le vent frais qui l’accompagnait semblait courir devant elle ; il bousculait le maigre feuillage des vignes en même temps qu’il balayait les nuages légers qui s’attardaient au ciel. Il buta contre nous avant d’entrer dans le potager où il alla secouer avec la même rudesse les choux et les rosiers, et il pénétra dans le figuier où il resta un long moment à retourner les larges feuilles et à siffler par les trous de la cabane.

Mlle  Herminie parlait d’une voix chantante et fine et, malgré le vent qui lui soufflait sur la bouche, j’entendis :

— Le jour où il partit, son baiser ne fut pas moins tendre que celui de la veille, ni ses mains