Page:Audoux - L Atelier de Marie Claire.djvu/207

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



XVI

Depuis que Mlle  Herminie pouvait disposer de quelques francs par semaine en plus de ses dépenses ordinaires, les boulevards et les jardins de Paris ne lui suffisaient plus. Il lui fallait suivre la foule des Parisiens qui s’en allaient chaque dimanche à la campagne, et pour cela elle se levait tôt et prenait goût à sa toilette. Moi-même j’étais heureuse d’échapper une journée entière à la ville, et toutes deux nous partions joyeuses et affairées comme pour une contrée lointaine et merveilleuse. Le plus souvent un tramway nous conduisait seulement dans la banlieue, mais d’autres fois le chemin de fer nous emportait bien au delà, et c’était alors que Mlle  Herminie croyait retrouver un peu du pays qu’elle avait quitté et qu’elle regrettait si amèrement. Le trajet était déjà pour nous comme une fête. Dès la sortie de Paris, c’était de chaque côté de la voie les immenses jardins maraîchers avec leurs cloches de verres s’alignant par centaines, et brillant sous le soleil comme des bassins d’eau claire. Puis venaient les vergers. Le printemps les avait fleuris de blanc et rose. Et lorsque le