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dire encore, tant elle avait craint les moqueries.

Elle ne savait pas du tout comment elle avait quitté le bal. Elle se souvenait seulement d’avoir eu très chaud, et d’avoir bu avec son dernier danseur. Puis, le jour suivant, elle s’était réveillée bien après midi dans une chambre qui n’était pas la sienne. Longtemps elle avait cherché à comprendre, et n’y parvenant pas, elle avait appelé, mais personne n’était venu. Alors une peur affreuse l’avait fait se vêtir en hâte et fuir la maison sans regarder derrière soi. Où était cette maison ? Comment s’appelait la rue ? Gabielle ne le savait pas, et elle comprenait bien qu’elle ne retrouverait jamais ni l’une ni l’autre.

La voix de Bouledogue gronda :

— Vous n’aviez guère la tenue d’une fille honnête à ce bal, et je peux bien dire que c’était une honte de vous voir pendue au cou de vos danseurs.

— J’avais tant de plaisir, dit Gabielle.

Son air innocent était si naturel qu’un léger rire échappa au patron.

Par contre, Bouledogue railla durement et ses sarcasmes apportèrent tant de confusion à la pauvre Gabielle, que Bergeounette prit sa défense et rembarra Bouledogue :

— Toi qui as la langue si sûre, à force d’aller au bal il t’arrivera bien un jour la pareille.

— Non, fit sèchement Bouledogue.

Et elle souffla violemment par le nez avant d’ajouter :